Viens, approche-toi Amala, j’ai quelque chose à te dire.

Tu le vois, je suis assise et j’ai pris racine sur ce siège de tout ce que tu as été été, de tout ce que je suis. Je suis assise au milieu de tous ces livres qui t’ont inspirée, bouleversée, émue, chamboulée, endormie, de tous ces mots et de leurs auteurs et autrices passionnées qui t’ont sauvé la vie depuis si longtemps. Au milieu de tous ces livres que nous avons écrits ensemble, toi et moi. Une tasse d’infusion d’herbe sauvage offerte par une belle âme fume à côté de moi.

Je pose mes mains lianes autour d’elle et observe ces précieuses servantes qui m’ont accompagnée. Leurs courbes, leurs rivières, leurs teintes comme un parchemin tacheté de brou de noix. Ces mains qui ont aimé, consolé, violenté, écouté, dessiné, rêver, serré, caressé, guidé, cherché, écrit tant et tant de mots, de contes, de mythes, de rêves…

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Tu le vois Amala, je ne cours plus. Je suis assise et j’ai pris racine. Et une paix immense a envahi mon coeur.

Tu l’attendais ce moment, n’est-ce pas ? Tu en rêvais depuis toute petite… Cette grand-mère sagesse que je suis devenue. Bien malgré moi. Je ne dirais pas de moi que je suis sage… Mais les années ont posé sur mon front un voile d’humilité et de simplicité que tu n’osais formulé… Je suis dépouillée. Telle que tu me rêvais.

Dehors, j’entends encore leurs cris de joie. Tes enfants, l’amour de ta vie. 

Et cet homme dont les pas se sont fondus aux tiens pour ne former plus qu’un, parmi les tempêtes et les marées. Leurs cris de colère, de réjouissance, d’injustice, d’impatience, d’exaspération, d’excitation… Cela te semblait interminable parfois dans les ouragans mais tu gardais patience. Tu savais que j’étais là, tout près de toi. Aujourd’hui d’autres cris de joie ont remplacé ceux de nos enfants…

Ceux d’autres enfants, les enfants de nos enfants, ceux de leurs amis que l’on a vus naître… Cela te fait pleurer… N’est-ce pas ?

Le temps qui file t’a toujours fait pleurer… Quand ta mère t’a demandé petite ce que tu garderais si la maison brûlait, tu as répondu : « Les albums photos ». Ironie du sort, tous les films de ton enfance ont disparu par malchance…

Amala, je t’aime tellement. Je te vois forte, douce, courageuse, fière, humble, obstinée, dans le doute, dans la peur, je te vois chrysalide et papillon, je te vois oser mourir et ne pas encore vouloir projeter ta renaissance…

Tu es aujourd’hui à un carrefour de ta vie, tu me l’as écrit. Celui où tu as deux choix : l’autoroute de ce que tu connais et maitrises, ce que tu as appris et ce que tu as vu faire chez ceux chez qui tu as grandi… Une route sécurisante et audacieuse, pleine de succès satisfaisants et d’efforts acharnés. Ou bien le petit chemin de terre, presque effacé, qui mène vers la forêt. Ce petit chemin au bout duquel on ne voit rien et où les louves hurlent de joie à chaque passage de la grande Séléné sur son char d’argent… Ce petit chemin tortueux où il faut renaître et oser mourir à ce que l’on a été.

Oser mourir au grand rêve qui a précédé pour laisser de la place à ce qui veut vivre si fort. Tu connais ce moment… L’évidence contre laquelle tu ne peux plus lutter. Celle de ton corps qui dit « stop », de ton âme qui se dessèche malgré les réussites.

Les autres sont heureux et satisfaits, et toi, tu sens bien que quelque chose ne fonctionne plus à l’intérieur. Que cela ne vibre plus de la même manière. Il est temps, il est temps, chuchote-t-elle… Tu l’as écrit. Il est temps de refaire de l’espace pour la Source, pour que ton âme retrouve sa vibration la plus élevée, la chrysalide suivante, celle qui appelle et veut germer dans ton utérus. La vibration de la louve sauvage qui appelle tes pas loin de la louve devenue un peu trop civilisée.

Je t’aime, et je te vois. Pleinement, fièrement, entièrement. Je vois tout ce que tu ne peux pas toujours voir de ce que tu donnes sans le reconnaitre. De tout ce que tu guéris dans les cœurs et renoue dans les âmes. Je vois ce que tu offres au monde, alors même que tu crois ne pas en faire assez pour les autres et que tu t’en veux.

Aujourd’hui, j’ai pris racine. Je suis devenue ce lieu dont tu rêves tant, cette cabane dans la forêt. Mais je suis aussi assise aux bordures de la ville, car elles viennent vers moi. Elles ont besoin de ces histoires que nous leur rappelons. Ces histoires de leur âme. Ces chants que leurs rêves leur offrent. Cette nuit, je t’ai offert trois rêves lucides… Tu y as eu tout le choix du monde : celui d’inventer et de réinventer. De retrouver ta déesse, tes maitres, tes souvenirs, de traverser une forêt où tu t’es émerveillée devant des écureuils à pelage en forme de coeurs et d’autres êtres fantastiques… De faire exactement tout comme il te plaît, au-delà de la peur de décevoir ou d’abandonner.

Il n’y a que lorsque tu abandonnes ta propre joie que tu abandonnes réellement les autres. Lorsque tu vibres dans ton Dharma au milieu de tes racines irriguées, tu es Don pour le monde.

Je suis venue dire au travers de toi, à toutes les louves devenues un peu trop civilisées, de prendre le cadeau de ce portail annuel entre deux réalités pour écouter encore plus profondément… Qui veulent-elles être à présent ? Qu’est-ce qui gronde et appelle ? Qu’est-ce qui les en empêche ? Est-ce que leurs laisses sont faites de justifications et de raisons pour les autres ?…

Rappelle-leur le chant de leur âme. Rappelle-leur que toutes, âmes, nous sommes venues vibrer fort et haut. Et que si elles entendent ce chant, elles sont faites pour montrer la voie du sauvage et du sacré.

Quel est le prochain petit chemin de terre dont vous rêvez ? Avec un peu trop de boue et de dangers pour la louve civilisée que vous êtes… Mais qui crée une joie explosive dans votre ventre et dans les rivières printanières de vos yeux ?

Accueillez le vide… Invitez-le. Offrez-lui une tasse de thé pour patienter le temps que vous honorez jusqu’au bout ce que vous souhaitez achever, comme vous l’avez déjà si souvent fait dans tes nombreuses vies. Puis ouvrez-lui grands les bras. N’ayez pas peur… Le vide est ce dont nous venons toutes et tous. Et si nous ne retournons pas suffisamment souvent le saluer, c’est lui qui s’invite à notre porte… Plus brusquement que certaines parts de nous le voudraient.

D’une grand-mère vers tant d’autres. Les Moires qui tissent et coupent ne le font pas qu’une fois dans une vie comme on voudrait nous le faire croire… Elles sont ces grands-mères sagesse qui savent qu’il faut de temps en temps couper les cordons pour reprendre sa pleine et sauvage liberté !

A propos de l’initiatrice : Amala

 Spécialiste du rêve et des archétypes, passionnée par l’éveil des femmes, elle transmet à travers formations, cercles, conférences et ouvrages. Elle est la fondatrice de l’Ecole des Mystères, les Eveilleuses du Féminin, qui renouvelle les rites de passage et avoirs ancestraux.  Elle a également co-fondé pendant quelques années un écolieu, le Centre Duo MoonDo (FR), dédié à la transformation individuelle. 

Dans tous ses livres, elle partage autour de mythes et d’archétypes pour véhiculer ses messages par des images de rêves plutôt que par l’intellect pur. Elle a donné de nombreuses formations en présentiel sur les archétypes et les déesses, ainsi que des programmes en ligne.

Les 13 clés réunit toutes ces transmissions autour de la psychologie des profondeurs, le Voice Dialogue, le rêve, l’astrologie, le symbolisme… 

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